Trouvé il y a déjà quelques temps en brocante cet impossible trophée de chasse a été l'objet de nombreuses supputations de la part de mes visiteurs. Pour moi la chose est claire et ma théorie, aussi farfelue soit elle, semble convenir tout à fait aux moins de douze ans, qui me quittent forts d'une nouvelle connaissance.
Le lièvreuil était encore très courant dans les plaines du Santerre (en Picardie) à la fin du XIXe siècle mais l'épidémie de myxomatose de 1910 eu raison de la presque totalité de la population. La bataille de la Somme de l'été 1916 et l'utilisation du gaz moutarde mirent fin définitivement à l'espèce.
Au dire du vendeur, l'intrigant trophée venait de la Forêt Noire. Quelques recherches plus tard, je trouve sa trace sous le nom de Wolpertinger dans les Alpes Bavaroises où il est l'équivalent de notre dahu, une chimère évoquée pour moquer les citadins et les touristes.
Le Wolpertinger allemand, des ailes de faisans viennent s'ajouter aux cornes.
Plus au nord en Suède, le musée de Sundsvall accueille l'œuvre du taxidermiste Rudolf Granberg réalisée en 1910 et qui représente le skvader.
Le Skvader, plus de cornes…
Les Étas-Unis du XIXe siècle ont vu arriver dans les valises de migrants allemands le Wolpertinger baptisé aussitôt Jackalope (de Jackrabbit (lièvre) et Antelope (Antilope)). Dès les années 30, des cartes postales le représentant circulaient amplifiant ainsi les mythes locaux.
Un Jackalope dans le Dakota du sud.
Toute légende possède en général un brin de vérité. Il semble que les lapins atteints d'un papillomavirus (qui provoque des tumeurs noirâtres allongées sur le corps de l'animal, parfois en forme de cornes sur leur tête), aient pu être observés il y a déjà bien longtemps.
Planche zoologique de la fin du XVIe siècle, montrant un lièvre cornu.
Pour le coup, et découvrant après l'existence du mot Jackapole, je trouve que mon néologisme Liévreuil, lui aussi mot valise ne lui va pas si mal.